Gestion active/passive, réaction #5

Publié le 04/07/2016 - Jean-Christophe Cotta
Le point de vue de Jean-Christophe Cotta, gérant d'Allocation & Sélection

J’appellerai bien volontiers le dépassement de l’opposition entre la gestion active et la gestion passive.

D’abord, parce que le débat sur l’efficience des marchés me semble largement dépassé (infirmé par les grandes crises des marchés que nous avons connues depuis plus de 30 ans comme par les avancées et les développements académiques portant sur la finance comportementale, la finance cognitive, la théorie de l’information, celle de l’agence et autres joyeusetés).

Ensuite, parce qu’à l’intérieur de ces deux types de gestion, la frontière ne me semble plus très claire. Il existe de la gestion indicielle au sein de la gestion active (en cas de forte volatilité des marchés) et de la gestion fort spéculative dans la construction et l’administration de certains fonds ETF, du fait des stratégies à levier qui sont proposées à la sagacité de nos investisseurs.

Enfin, parce que nous oublions dans le débat le troisième type de gestion, qui s’est affirmé avec plus de vigueur que la gestion indicielle, la gestion alternative, incluant l’immobilier, le private equity et les hedge-funds. Très franchement active, et aussi rentable malgré des frais de gestion net élevés.

Nous avons l’embarras du choix, qui se comptent en dizaine de milliers de fonds accessibles sur le marché européen. Nous avons pour cela des contraintes ; nous n’avons pas toutes les mêmes d’ailleurs. Elles dépendent essentiellement du type de clients suivis, de l’univers d’investissement, de l’enveloppe fiscale le cas échéant et bien sûr de l’horizon de temps d’investissement.

Les contraintes dépendent aussi de l’aversion au risque de la clientèle, de sa réactivité et surtout de son expérience face aux adversités des marchés financiers. Les dernières contraintes sont d’ordre comportementale : intérêt pour certaines marques de fonds, poids des performances passées dans la décision d’investir en cas de hausse mais aussi de ne pas investir après une forte baisse, charisme de certains gérants phares, et l’entre-soi, qui favorise des investissements mimétiques entre clan ou tribu avec ou sans totem, d’ailleurs.

Notre création de valeur en tant que modeste allocataire et sélectionneur consiste à suivre, valider et pondérer au sein des allocations d’actifs les gérants de fonds pour leur comportement propre…L’importance de chaque fonds dépend bien sûr de la rentabilité à moyen long terme au-delà de leurs frais de gestion. Et bien sûr, plus ces frais sont importants, plus il leur sera difficile d’exceller dans notre monde de brutes.

Mais, surtout et avant tout, une large partie de notre résultat n’est pas directement liée à la sélection de fonds de gérants de plus en plus méritants (50 par orientation au bas mot) mais elle réside dans les anticipations d’allocation portant sur la surpondération des actifs porteurs et la sous-pondération des actifs en moindre forme dans le futur proche.

Pour ma part, et pour ne reprendre que les deux grands types de gestion active non alternative, je suis tenté par l’approche gestion active indicielle, en cas de brouillard sur nos marchés financiers et par des gestions actives de plus en libres (d’anglo-saxonnes à la gestion de conviction bien française) lorsque des tendances sur 18 mois se dessinent un peu plus clairement.

Et pour ce qui concerne la gestion alternative, elle se retrouve souvent actuellement dans nos positions d’attente. Les gérants consistants dans leur style et leur originalité de gestion font le reste.

Jean-Christophe Cotta est gérant d'Allocation & Sélection.